Contestation en Iran : « au moins 208 morts », selon un nouveau bilan d’Amnesty
Pour l’ONG, les forces de sécurité iraniennes se sont engagées dans
une « horrible tuerie » pour réprimer le mouvement de contestation qui a
vu le jour mi-novembre.

Au moins « 208 personnes »
ont été tuées dans la répression du mouvement de contestation qui a vu
le jour mi-novembre en Iran, a affirmé, lundi 2 décembre, Amnesty
International, revoyant à la hausse son précédent bilan de 161 morts
publié vendredi.
« Le bilan réel » de cette répression « est vraisemblablement supérieur » à 208 morts, ajoute, dans un communiqué, l’ONG basée à Londres, précisant que cette estimation se fonde sur des « informations crédibles »
obtenues par ses soins. Des dizaines de morts ont été enregistrées dans
la seule ville de Chahriar, dans la province de Téhéran, « l’une des villes où le bilan (…) est parmi les plus élevés », selon Amnesty.
« Ce
bilan alarmant est une preuve supplémentaire que les forces de sécurité
iraniennes se sont engagées dans une horrible tuerie », estime dans Philip Luther, directeur de recherches d’Amnesty pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. Il « démontre le mépris total des autorités iraniennes pour la vie humaine », ajoute-t-il.
Survenues
le 15 novembre à la suite de l’annonce d’une hausse du prix de
l’essence, les manifestations, violentes par endroits, se sont
rapidement étendues à au moins 40 villes et localités. Elles ont été
accompagnées d’incendies ou d’attaques de stations-service,
commissariats, centres commerciaux, mosquées ou bâtiments publics, selon
les médias iraniens.
Les familles des victimes menacées
Les autorités iraniennes, selon lesquelles le mouvement de contestation est le résultat d’un « complot » ourdi à l’étranger, avaient réagi au précédent bilan d’Amnesty, le jugeant « exagéré ». Elles n’ont confirmé la mort que de cinq personnes – quatre membres des forces de l’ordre tués par des « émeutiers » et un civil – et ont annoncé environ 500 arrestations, dont celles de 180 « meneurs ».
Interrogé
dimanche au cours d’une conférence de presse à Téhéran, le président de
l’Assemblée consultative islamique, Ali Larijani, n’a pas donné de
bilan. « Quant au fait que certains ont été blessés, ont eu des problèmes ou que des propriétés [privées] ont été brûlées ou endommagées, les organes de sécurité vont se pencher sur la question », a-t-il déclaré.
Dans son communiqué de lundi, Amnesty exhorte la communauté internationale à faire en sorte que les responsables de « cette répression sanglante » rendent des comptes, et accuse les autorités iraniennes de n’avoir aucune « intention de mener des enquêtes indépendantes et impartiales ».
L’ONG
affirme aussi que des familles de victimes ont été menacées et ont reçu
pour consigne de ne pas parler aux médias et de ne pas organiser de
funérailles pour leurs proches. Amnesty précise encore avoir analysé et
vérifié des vidéos montrant « que les forces de sécurité iraniennes ont tiré contre des manifestants non armés ».
L’accès
à Internet avait été bloqué dans l’ensemble du pays dès le 16 novembre
au soir, rendant très difficile une évaluation de l’ampleur de la
répression.
Rassemblement à Paris
A
Paris, quelques centaines de personnes, Iraniens et sympathisants, dont
des élus français, ont manifesté lundi après-midi contre « le massacre » en Iran, réunis derrière une banderole où était écrit « Le massacre des manifestants est un crime contre l’humanité ». « Le
régime est passé à une nouvelle phase : il a donné l’ordre systématique
de tirer sur les manifestants. C’est inédit. Jamais il n’y a eu un tel
massacre », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Behzad Naziri,
membre du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI),
organisateur de la manifestation.
« La communauté internationale doit condamner sans complaisance. Il faut cesser de fermer les yeux »,
a poursuivi le membre du CNRI, qui fédère une partie de l’opposition à
l’étranger et, en particulier, les Moudjahidine du peuple, groupe
d’opposition en exil qualifié de secte « terroriste » par Téhéran.
« La France doit prendre l’initiative d’une mission d’enquête dans les prisons en Iran »,
a-t-il ajouté, reprenant l’appel du Comité parlementaire pour un Iran
démocratique, qui réunit des députés français et soutient l’appel du
CNRI à l’établissement d’une mission des Nations unies visant à « évaluer le nombre et la situation des personnes tuées, blessées et emprisonnées ».